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    Heiata Aka, une artiste dans l’âme

    Publié le 12 décembre 2018

    La culture polynésienne a toujours été au centre des différentes activités de Heiata AKA. Celle qui aujourd’hui se fait connaître pour ses sublimes créations de bijouterie de luxe et qui se définit comme une artisan-artiste s’est confiée à Femmes de Polynésie.

    UNE PASSIONNÉE DE DESSIN

    Heiata était une adolescente rêveuse, qui était plutôt douée en classe, mais uniquement dans les matières qui l’intéressaient. Elle adorait surtout le dessin, et se souvient que, pendant les cours de maths, son professeur venait la voir au dernier rang de la classe et commentait les dessins qu’elle faisait sans la gronder de ne pas suivre son cours.

    « j’adorais l’univers heroic fantasy, le dessinateur Royo en particulier »

    Son inspiration dans le dessin était un monde fantastique qui lorgnait du côté des dessins de Luis Royo, des livres de Tolkien, et de tout ce qui relevait de l’univers heroic fantasy. Heiata aimait lire, écrire aussi. Dans sa famille, on pratiquait des jeux de rôles. À l’heure du baccalauréat, Heiata s’était fixé un objectif : le décrocher mais avec surtout une note de 20/20 en arts plastiques.

    « pour l’épreuve d’arts plastiques au Bac, je réquisitionne une salle de classe pour réaliser une vraie performance »

    Et en effet, elle la bichonne son épreuve d’arts plastiques au Bas. Alors que certains élèves s’étaient sans doute contentés de peintures ou de dessins, Heiata voit très grand et demande l’autorisation de disposer d’une salle de classe qui sera partie intégrante de son travail.

    Et c’est une véritable performance d’art contemporain qu’elle réalise : elle organise l’obscurité dans la salle en occultant les fenêtres, en disposant du sable par terre, en accrochant des masques moulés sur les visages de ses camarades et en installant une source de lumière créant l’ambiance qu’elle imaginait, voulant faire passer le message que dans l’obscurité, on peut toujours trouver la lumière.

    Des profs se souviennent sans doute de cette installation qui a valu à Heiata la meilleure note, au point même de laisser l’installation en exposition pendant plusieurs semaines.

    « la suite logique aurait été de partir faire les Beaux-Arts… mais…»

    Forte de cette réussite, Heiata veut continuer dans la création artistique et, avec son professeur, elle prépare un dossier pour l’inscription à l’école Boulle et les Beaux-Arts. Elle s’y voit déjà sauf que sa maman s’y oppose, n’imaginant pas sa fille unique perdue dans Paris…

    Nous sommes en 2001, et Heiata se demande vers quoi s’orienter compte tenu du veto maternel… Ce sera l’Université de Polynésie Française mais il n’y a pas de filière Art dans le cursus proposé, et après un semestre en Histoire Géo, elle renonce et se lance dans le monde du travail.

    « je découvre le monde de l’enseignement et de l’éducation »

    Après un petit boulot comme commis à l’ex Cafète près de l’aéroport, Heiata est orientée par une boîte d’intérim vers la DES, la Direction des Enseignements Secondaires. Elle y fera différents postes, observant les différents aspects du travail qu’elle apprécie et qu’elle qualifie d’expérience enrichissante.

    Ce mot « enrichissant » qui revient souvent dans son récit, et qui démontre qu’elle fait les choses avec du coeur et qu’elle en tire à chaque fois des leçons pour l’avenir.

    Cela l’amène au Collège Henri Hiro de Faa’a, où elle va devenir surveillante, seule femme au milieu de surveillants hommes dans une ambiance très particulière, avec des bagarres fréquentes entre les élèves et des échanges parfois houleux avec des parents qui semblaient avoir démissionnés de leur mission éducative..

    LA PÉRIODE ORI TAHITI ET MISS HEIVA.

    Alors qu’elle ne cesse jamais de dessiner, Heiata se consacre désormais à son autre passion : la danse, le ori tahiti, à travers la troupe Nonahere, sous la houlette de Matani Kainuku.
    Matani la pousse à se présenter à l’élection de Miss Heiva en 2006, en insistant, face à son hésitation, pour qu’elle fasse un effort.

    « avec Miss Heiva, je prends confiance en moi »

    Un exercice particulier et un véritable défi personnel puisqu’en une semaine elle doit trouver la confiance en elle qui lui manque et, en même temps, préparer un chant, confectionner un panier, réviser une danse, maîtriser un orero, cuisiner un poisson cru et imaginer une composition florale !

    Et Heiata gagne le titre de Miss Heiva. Nous sommes en 2006.

    Après un passage au Ministère de la Santé qui, là aussi, se révèlera très utile, Heiata ouvre son école de danse, et monte la troupe Ra’mana dans laquelle elle met un point d’honneur à véhiculer des valeurs et des émotions, sauf que son style est jugé trop moderne, trop marginal.

    Elle comprend qu’il faut évoluer sans jamais perdre son âme, notion qu’elle résume parfaitement avec cette métaphore :

    « les feuilles d’un arbre peuvent changer de couleur, mais pas le tronc »

    Et comme Heiata n’a jamais cessé de dessiner, elle en tire également un enseignement sur l’Art en général en comprenant qu’il faut toujours garder les fondamentaux.

    REMISE EN QUESTION

    Heiata devient maman. Après une rupture difficile avec le père de sa fille, elle réalise que les fondations de sa vie sont vacillantes. Une véritable remise en question s’impose.

    Pendant deux ans elle travaille à la boutique Chic de Robert Wan. Puis son nouveau compagnon, pompier, part pour venir en aide à Haïti, où il devait partir trois mois mais y reste finalement huit mois.

    Heiata le rejoint en Guadeloupe, avant de rentrer ensemble au fenua. Elle retourne à l’Université où une filière artistique a vu le jour, sauf qu’il s’agit d’art dramatique et de théâtre… Elle replonge dans les livres et se passionne pour les cours d’Histoire et de culture polynésienne.

    « la révélation : ma découverte du Centre des métiers d’Art… »

    Aussi incroyable que cela puisse paraitre, Heiata fait une véritable découverte en entendant parler pour la première fois du Centre des Métiers d’Art. Une vraie révélation : c’est la structure dont elle rêvait pour exprimer sa créativité. Elle l’intègre après le concours d’entrée. Heiata a un caractère bien trempé et a du mal à se plier aux directives des enseignants :

    « pourquoi dois-je dessiner ce qu’on me fait regarder et pas créer… imaginer… ? »

    Son impatience et sa créativité bouillonnante l’oppose à la pédagogie qu’on lui impose, au point de se heurter aux responsables du CMA. Son tempérament sanguin lui fait claquer la porte sur un coup de tête puis elle se ravise rapidement et revient vers la Direction en déclarant, très fière et sûre d’elle :

    « je vais vous prouver que je suis la meilleure ! »

    Et ce n’était pas un caprice de prétentieuse ! Heiata ne s’accorde qu’une parenthèse avec ses deux enfants mais s’investit à 200% dans les études. A force de concessions et d’efforts, cela paye : elle devient major de sa promotion avec une note de 18,5/20, qui serait presque pour elle une déception.

    Avec le recul, elle se souvient de ces péripéties mais remercie le Centre des Métiers d’Art pour tout ce qui lui a été enseigné et résume son passage en une phrase :

    « c’était le début de ce que j’ai toujours voulu faire »

    A la sortie du CMA, Heiata prend une patente et crée sa marque : KEA concept, ce qui lui permet de découvrir sur le tas le monde de l’entreprenariat.

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    L’AVENTURE KEA CRÉATIONS

    Heiata fait son premier salon d’artisanat d’Art dans le hall de l’Assemblée en 2016. Elle découvre, à cette occasion, ses concurrents, les autres exposants.

    C’est lors du même salon en 2017 qu’elle décroche le 2ème prix de création du plus beau bijou, belle récompense mais Heiata, en perfectionniste et éternelle insatisfaite, regrette de ne pas avoir eu le premier prix !

    Depuis, elle a trouvé son style et son équilibre, auprès de son compagnon avec qui elle travaille en binôme, et qui a laissé de côté sa carrière de pompier.

    « on aime ce qu’on fait et c’est grâce au Centre des Métiers d’Art »

    Aujourd’hui, elle remercie toujours le CMA et se souvient également qu’elle avait été sollicitée pour la décoration des avions d’Air Tahiti. Les motifs sur le fuselage des ATR sont l’œuvre de Heiata, choisis parmi diverses propositions des élèves.

    Car Heiata développe aujourd’hui des logos et pratique également l’Art numérique qui lui permet des impressions sur des plaques d’alu brossé. Elle a conçu également les motifs de la nouvelle collection sportswear de la marque Sphere de la championne de MMA Flore Hani (1).

    LES PROJETS

    Heiata fabrique aujourd’hui des pièces artistiques uniques avec une symbolique très forte, comme lorsqu’elle explique la signification du pendentif qu’elle porte autour du cou.

    Elle doit passer maintenant à la sculpture d’Art. KEA créations sera désormais gérée par le tane de Heiata car elle vient de se fixer un nouveau challenge : elle réussit un concours de la fonction publique pour le recrutement d’assistants d’éducation artistique de catégorie B. Ce qui se concrétisera prochainement par un poste au… CMA… où elle enseignera l’art de la gravure.

    Côté artistique, on verra ses œuvres au salon de la bijouterie d’art en février 2019, que ses ambitions la projette maintenant dans le textile…  Une première série de t-shirts a d’ailleurs ouvert la voie.

    Et puis enfin, en octobre 2019, ce sera une expo à la salle Muriavai de la Maison de la Culture pour sa 2ème exposition d’art contemporain Polynésien. Heiata, une artiste exigeante et passionnée aux œuvres fortes, inspirées et envoûtantes.

    1 voir portrait dans FEMMES DE POLYNÉSIE

    Laurent Lachiver
    Rédacteur web

    © Photos : Laurent Lachiver – Heiata AKA

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